Avant de partir en vacances, le gouvernement a lancé une grande offensive médiatique sur la sécurité visant à faire oublier les affaires et à préparer la campagne de 2012. Un sondage orienté du Figaro semblait indiquer que la stratégie avait fonctionné, jusqu’à un autre sondage, de Marianne.
A malin, malin et demi…
Il n’y avait pourtant pas besoin d’être un grand spécialiste de la vie politique pour deviner l’issue de la séquence « sécurité » du gouvernement. Dès les annonces du gouvernement, j’avais souligné qu’il était probable que les mesures annoncées avaient été testées avant d’être rendues publiques. Prise séparément, il n’était pas vraiment étonnant qu’elles soient populaires. N’oublions pas que les réponses sont données sans un véritable temps de réflexion.
Il y a une semaine, je concluais un autre papier sur le sujet de la manière suivante : « je rêve qu’un contre-sondage soit organisé pour bien montrer à quel point il faut relativiser les résultats de celui du Figaro. Le bilan serait sans doute beaucoup moins glorieux pour le gouvernement… ». J’en avais rêvé, Marianne l’a fait. Les résultats sont spectaculaires : à peine 27% des Français pensent que la politique de sécurité menée depuis 2002 est plutôt efficace contre 69% d’un avis opposé.
Même les sympathisants de droite sont une majorité à condamner les résultats de Nicolas Sarkozy : 53% contre 45%.... 73% des Français attribuent une part de responsabilité aux inégalités sociales contre 47% qui citent l’immigration. Bref, derrière l’agitation verbale et législative du gouvernement, et malgré des annonces calibrées pour plaire à l’opinion, le discours du gouvernement ne prend pas et les Français condamnent largement le bilan des huit dernières années.
Des conséquences imprévisibles
Nicolas Sarkozy semblait vouloir jouer en grande partie sa réélection sur les questions de sécurité intérieure. Ce sondage montre qu’il s’agit d’un pari hautement incertain puisqu’à peine un quart des Français jugent sa politique efficace dans le domaine. Après, il est dommage de ne pas avoir testé la crédibilité du Parti Socialiste par rapport à celle de l’UMP dans la lutte contre l’insécurité. Si l’écart est encore important, la carte n’est peut-être pas perdue, mais cela serait très difficile.
Bref, Nicolas Sarkozy jouerait avec le feu en enfourchant le cheval de la lutte contre l’insécurité en 2012. Sa perte de crédibilité dans ce domaine a toutes les chances de le disqualifier définitivement (à moins qu’il reste nettement préféré au Parti Socialiste, ce qui n’est pas totalement impossible). Du coup, en agitant ce débat, il pourrait favoriser une poussée du Front National et alors subir le même sort que celui de Lionel Jospin en 2002 : être éliminé dès le premier tour.
Merci à Marianne pour ce sondage qui montre l’intelligence des Français, qui ne confondent pas l’agitation gouvernementale avec de l’efficacité. Le « No-Sarkozy day » d’avril 2012 pourrait bien être radical…
Laurent Pinsolle